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Lara JoVentre
12 mars 2012

"Monsieur le Président, je travaille déjà 45 heures par semaine" (témoignage)

Lettre d'une enseignante à Mr Sarkozy
Travailler huit heures de plus par semaine pour 25% de salaires en plus. Mardi dernier, dans Des paroles et des actes, Nicolas Sarkozy a dévoilà l'une de ses mesures de candidat président concernant les enseignants de collège et de lycée. Mais derrière les arguments de "bon sens" manié par le candidat de l'UMP se cache une vision totalement erronée du métier et de l'emploi du temps réel des profs du secondaires. C'est que démontrent  Gwladys, Marie, Sandrine, enseignantes du secondaire, dans une lettre ouverte adressée au président de la république pour encore cinquante jours. Humanite.fr publie leur coup de gueule en deux temps, par une adresse formelle puis à la façon de Boris Vian.

"Nous, enseignants, sommes scandalisés des propos qui ont été tenus lors de l'émission télévisée "Des paroles et des actes" du mardi 06 mars 2012 par le Président de la République. Au-delà d'une méconnaissance totale du travail effectif des enseignants du secondaire, ils révèlent un profond mépris de notre profession.

Il est inadmissible que de telles affirmations mensongères soient diffusées à une heure de grande audience sans réaction de notre part et sans qu'aucun droit de réponse ne nous soit accordé. Il est inadmissible de laisser propager l'idée totalement erronée qu'au-delà de nos dix-huit heures d'obligation de service, nous ne sommes ni à la disposition de nos élèves, ni à celle de leurs parents (à lire: Sarkozy, premier prix à l'école de la duperie).

Sans vouloir polémiquer sur la proposition de M. Sarkozy qui voudrait nous faire travailler 44% de notre temps de travail en plus, rémunéré 25%, nous sommes choqués de ses paroles et la motivation et l'enthousiasme sans cesse renouvelés qui nous animent et nous conduisent à ne jamais compter nos heures pour mener du mieux possible la mission de service public, qui nous a été confiée et que nous avons choisie, s'en trouvent profondément ébranlés.

Nous sommes consternés, effondrés, anéantis. Gwladys, Marie, Sandrine, enseignantes du secondaire.

Monsieur le Président

Monsieur le Président, Je vous fais une lettre Que vous lirez peut-être, Si vous avez le temps. L’autre soir je vous ai écouté, Dans une émission télévisée, Décrier notre métier, Tenir des propos erronés.

Comment pourrais-je décrire fidèlement, Ce que j’ai ressenti en cet instant ? Quelques minutes devant mon écran, Ont suffi à mon anéantissement. Je n'ai jamais compté mon temps, Monsieur le Président, Cela s'appelle la générosité, Et il y en a, dans notre métier. Il ne sont pas rares les plus dévoués, Contrairement à ce que vous souhaitez faire penser, Monsieur le Président. Je consacre deux heures, Aux élèves en difficulté, Je consacre trois heures, A ceux qui ne parlent pas français, Je n'ai jamais refusé de rencontrer, Un parent qui me le demandait. Et quand je sors le soir, Il n'y a plus dans mon établissement, Un seul enfant pour me dire au revoir.

Ce trimestre, j'ai corrigé 1800 copies, Je suis venue tôt faire mes photocopies, J'ai préparé mes cours assidûment, longuement, Sérieusement, consciencieusement. Mon petit garçon n’a de cesse, De réclamer ma tendresse Des week-ends durant, Devant la porte du bureau, Où je m’enferme en travaillant.

Et puisqu'il faut compter, Monsieur le Président, Comme si l'école était une entreprise, Qui elle aussi connaît la crise, Je travaille au bas mot, Quarante-cinq heures par semaine. J'ai passé cinq ans à l'université, Pour me spécialiser, Je ne peux pas enseigner, Autre chose que ce pourquoi, La France m'a diplômée.

Faudra-t-il proposer des cours au rabais ? N'est-ce pas cher payer, Pour économiser ? La France est bien abîmée, Fallait-il en rajouter, Humilier, désespérer, Les Hussards des collèges et lycées ? Et les parents, les enseignants diviser ? Et si l’ennemi de la France, N’est pas la finance, Pourquoi mettre au banc des stigmatisés, Les professeurs depuis cinq années ? Est-ce donc là votre idée, De la justice et de l'équité ?

S'il faut économiser, Monsieur le Président, Revoyez les salaires de nos dirigeants, Vous êtes bon apôtre, Monsieur le Président, Je vous ouvre ma porte, celle de l'école forte, Vous avez la tête pleine, De haine, de rancune et de données, Nous avons l'âme pleine, D'idéaux, de devoirs et de dignité.

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Lara JoVentre
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