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Lara JoVentre
9 septembre 2011

Universités, grandes écoles et patronat s'opposent à la baisse de l’immigration légale

09 SEPTEMBRE 2011 | PAR CARINE FOUTEAU

À l'heure de la rentrée universitaire, les étudiants étrangers sont plus que jamais sous la surveillance des préfectures. Les instructions données par Claude Guéant, le ministre de l'intérieur, dans sa circulaire du 31 mai 2011 sur la«maîtrise de l'immigration professionnelle», entrent en effet en application. Dans ce texte réglementaire, dont l'objectif est de mettre en œuvre le projet gouvernemental de réduction de l'immigration légale de 20.000 personnes par an (sur environ 200.000 entrées), il est abondamment question de «rigueur» et de «contrôle approfondi». Suspectés en filigrane de s'inscrire à la fac pour être autorisés à séjourner en France, les étudiants sont dans le collimateur, en tant que potentiels travailleurs concurrents des salariés français. Interrogé par Mediapart, Louis Vogel, le président de la Conférence des présidents d'université (CPU), s'inquiète des répercutions de«ce changement radical dans la politique migratoire», dénonçant par avance «un coût collatéral élevé» pour l'attractivité du pays. Lancée par Nicolas Sarkozy en 2002, la page de l'immigration «choisie» est définitivement tournée. Supposée symboliser cette tendance, la carte compétences et talents, délivrée pour une durée de trois ans au lieu d'un, a été un échec, faute de candidats. Crise économique et sociale à l'appui, Claude Guéant assume le revirement. «Il convient de rappeler, indique-t-il dans sa circulaire co-signée avec Xavier Bertrand, le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, que les étudiants étrangers ont prioritairement vocation, à l'issue de leur séjour d'études en France, à regagner leur pays pour y mettre en œuvre les connaissances acquises.» «Vous veillerez, insistent-ils auprès des préfets, à examiner avec une particulière attention l'adéquation du diplôme avec l'emploi proposé. Vous éviterez de donner une suite favorable au maintien dans un emploi occupé lors des années d'études en tant qu'étudiant, dès lors que cet emploi n'exige aucune qualification particulière (...)» Dans un entretien à l'AFP du 8 août, le ministre de l'intérieur va plus loin en précisant que les préfectures devront assurer un «suivi régulier des études et des examens passés» par les étudiants étrangers, 65.000 d'entre eux étant arrivés en 2010, selon les statistiques de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii). «Ces durcissements ne vont pas dans la bonne direction, martèle Louis Vogel, donnant le ton de la réunion plénière de la CPU appelée à débattre de ce sujet jeudi 15 septembre. Depuis des années, nous travaillons à rendre les universités plus attractives. Des institutions comme Campus France ont été créées à cet effet. De telles dispositions vont faire fuir les meilleurs étudiants. Pouvoir travailler en France après ses études doit être considéré comme un complément de la formation initiale. La France part déjà avec un handicap: en Allemagne, par exemple, il est possible de travailler un an, alors qu'ici, c'est six mois. Si on ajoute des obstacles, on perd du terrain dans la compétition internationale.» «Le problème, poursuit-il, est le même pour les grandes écoles et les entreprises françaises. C'est le rayonnement de notre pays qui est en jeu. Les groupes qui financent des bourses d'étudiants trouveront moins de candidats.» Offensive des élites économiques? Ces propos rejoignent, de fait, les préoccupations de l'Association française des entreprises privées (Afep), représentant les intérêts des grands patrons, et de la Conférence des grandes écoles (CGE). Rarement contestataires, ces organisations ne s'expriment quasiment jamais sur les questions d'immigration qu'elles jugent politiquement trop sensibles. Leurs présidents, respectivement Maurice Lévy et Pierre Tapie, viennent pourtant de se fendre d'un courrier à Claude Guéant, comme l'a récemment révélé Challenges. Ils lui reprochent une«interprétation très stricte des lois et décrets» concernant le travail de la main-d'œuvre immigrée et notamment des étudiants de niveau master qui souhaitent poursuivre leur formation par un premier poste en France. Dans un mail diffusé aux adhérents de la CGE, Pierre Tapie, également à la tête de l'Essec, invite ses collègues à «faire remonter au niveau national tous les cas» d'étudiants essuyant des refus. Il y a un an, déjà, lors de leur congrès annuel, les grandes écoles, soucieuses de gagner des parts de marché à l'échelon mondial, avaient demandé des «assouplissements» des règles sur les frais d'inscription et l'enseignement en anglais, leur but étant de multiplier par trois le nombre d'étrangers en dix ans. Offensive des élites économiques? Pas vraiment. Sollicités par Mediapart, Maurice Lévy et Pierre Tapie rechignent à faire la publicité de leur correspondance estivale, préférant les pressions feutrées. Même si le la a été donné en haut lieu. Dès les déclarations de Claude Guéant, début avril 2011 dans leFigaro Magazine, le Medef avait mis en garde le gouvernement contre les dangers «d'un pays qui se ferme» et plaidé pour une immigration «raisonnable». Sa présidente, Laurence Parisot, avait toutefois pris soin de ne pas développer plus avant son argumentaire libéral. À ce moment-là, le patronat, à la faveur d'une alliance inhabituelle, s'était retrouvé sur la même ligne que l'opposition. Avec une divergence, son souci étant moins de défendre les droits des étrangers que d'élargir le réservoir de main-d'œuvre disponible pour les entreprises.

Source : http://www.mediapart.fr/journal/france/090911/universites-grandes-ecoles-et-patronat-sopposent-la-baisse-de-l-immigration-le?page_article=2

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